Jean-Jacques Bourdin et Nadine Morano



 Bourdin, un super animateur ? 
Comparativement aux programmes des radios majeures dans la tranche horaire 6h-10h, l’émission de Jean-Jacques Bourdin, « Bourdin 2012 » est la seule à être diffusée pendant 4 heures sans interruption et en direct. Menée de long en large par l’animateur phare de la chaîne, l’émission est tout de même ponctuée par les interventions de quelques chroniqueurs. Bourdin apparaît cependant comme étant l’élément principal de l’émission. Il est présent, attentif et réactif à tous les instants. Lors de l’interview de l’invité politique du jour, il mène seul le débat. On peut alors mettre en avant deux attitudes prises par l’animateur, en fonction du fait qu’il s’adresse à ses auditeurs ou qu’il soit dans le contexte de l’interview politique, en même temps diffusée à la télévision sur la chaîne du groupe, BFM TV.
La position qu’il adopte face à Nadine Morano pousse encore plus loin cette notion d’ambivalence, et c’est cette position qu’il faudra prendre en compte si l’on veut conseiller un candidat politique quant à la posture à adopter chez Bourdin. Nous reviendrons sur ce point dans notre dernière partie. Ainsi Jean-Jacques Bourdin peut être qualifié de « Super animateur », se comportant tantôt d’une certaine manière, tantôt d’une autre, dans le souci de rester toujours crédible pour ses auditeurs. Il endosse plusieurs rôles dans une émission de 4h qui porte son nom. De plus, le nom « Bourdin 2012 » l’inscrit d’emblée comme acteur essentiel de la prochaine campagne présidentielle.
Analyses commentées
Nous avons trouvé intéressant, dans le cadre d’une analyse destinée à construire la feuille de route d’un candidat politique, d’analyser deux extraits : le premier étant une interview/débat avec Nadine Morano, et le second un court extrait d’un appel d’auditeur/témoin, dans lequel Bourdin se justifie sur ses positions vis-à-vis des sujets d’actualité et des politiques.
L’intérêt présenté par ces extraits réside, d’une part, dans l’analyse d’une confrontation directe avec une personnalité de la scène politique, et d’autre part dans l’analyse de la prise de parole de Bourdin sur ses positions et attitudes.
Un candidat politique pourra à la fois tirer enseignements de la confrontation avec Nadine Morano, en saisissant les tenants et aboutissants d’une telle confrontation, et également se saisir des justifications de Jean-Jacques Bourdin quant à son rôle d’animateur agitateur.
    Jean-Jacques Bourdin face à Nadine Morano
Extrait de BFM TV du 5 janvier 2012, de 0,10 jusqu’à 6,30
A.    Grille d’analyse
Bourdin 2012
Jean-Jacques Bourdin
Nadine Morano
Domaine de pratique social 
Magazine d’actualité, émission d’actualité politique sous forme  d’interview

Principes
Réalité, Vérité, sérieux
Finalités
Faire de l’audience, faire connaître aux auditeurs les positions des politiques pour 2012, connaître la vérité
Etre exposé médiatiquement ;
Défendre les opinions du parti politique auquel elle appartient, défendre les positions de l’UMP. Promotion de son actualité politique (sommet social le 19 janvier)
Visées discursives
Faire parler son invité
convaincre
Orientation discursives
Hétéro-centré
 Hétéro-centré, explicatif
Rôle
Journaliste, interviewer
Femme politique, ministre, expert dans son domaine
Nombre de tour de parole
Nombreux (+++) , courts
Nombreux (++), longs
Temps de parole
 Court (2,26)
 Long (4,34)
Type de prise de parole
prenant
sollicitée
Type d’intervention
directive
réactive
Actes interlocutifs
Pose des questions, fait des critiques et des accusations
Répond aux questions, donne son avis
Relation  Verticale
  Relation quasiment égalitaire, rapport de force entre les deux personnes
Relation Horizontale
Position égalitaire : Bourdin casse les codes de la communication.  « Vous dites des bêtises, vous ne maitriser pas le sujet » lance-t-il à son invité.

B.    Analyse commentée
Rôles :
Jean-Jacques Bourdin est journaliste : il incarne, dans cette position, une figure professionnel qui connaît son sujet, et qui a pour but d’apporter du savoir à ses auditeurs/ téléspectateurs. Il adopte donc un discours hétéro centré puisque toutes ses questions concernent uniquement l’actualité politique en générale et l’actualité politique de l’invité.
Nadine Morano est l’interviewée. Invité en tant que femme politique (ministre de l’apprentissage) elle se place dans une position d’expert dans son domaine. Elle se doit de répondre aux questions du journaliste, et de montrer qu’elle maitrise son sujet.
Principes :
Il s’agit d’une émission d’actualité politique sous forme d’interview. Ceci implique des principes de réalité, de vérité et de sérieux. En effet, Jean-Jacques Bourdin s’appuie sur l’actualité pour ses questions, il doit donc être dans la réalité pour rendre crédible son émission. Nadine Morano, quant à elle, de par son statut, se doit de dire la vérité, au risque de ne plus être crédible et encore plus avant de décrédibiliser le parti politique auquel elle appartient. Les deux protagonistes se doivent donc d’adopter un comportement sérieux, conformément à ces principes.
Finalités :
Jean-Jacques Bourdin a pour finalité première de captiver ses auditeurs/ téléspectateur pour faire de l’audience. Afin de remplir ses principes, il fait tout pour avoir les réponses qu’il attend à ses questions. On constate en effet, qu’il répète souvent « quel est votre avis »(…) « Mais quelle est votre vis Nadine Morano »? (trouver la séquence) Car en tant que journaliste, et au-delà du fait de faire de l’audience, Jean-Jacques Bourdin a aussi pour finalité de « faire savoir » à ses auditeurs/ téléspectateurs : à cet égard, la forme de l’émission en interview est très approprié pour rendre le débat explicite.
Nadine Morano, en tant qu’invité politique du parti UMP, a plusieurs finalités. Ainsi, être exposée médiatiquement lui permet de vivre à travers les médias et donc de pouvoir « toucher » des auditeurs/téléspectateurs durant son discours. Par ailleurs, en tant que représentante de l’UMP, elle est aussi présente pour défendre les idées de son parti.
Prenons l’exemple de François Hollande et du terme de « sale mec » qu’il a employé à propos de Nicolas Sarkozy. Bourdin veut à tout prix avoir son avis. Une troisième finalité qu’il est intéressant d’évoquer, concerne son actualité politique. Ceci n’est pas présent dans l’extrait choisi mais la deuxième parti de l’interview est consacré à l’actualité politique de Nadine Morano. C’est donc l’occasion pour la ministre de l’apprentissage de faire savoir ce qu’elle entreprend de faire dans les prochaines semaines.
Visées :
Jean-Jacques Bourdin : en tant que journaliste, se doit de faire parler son invitée. Il pose des questions auxquelles il veut des réponses précises. (il insiste régulièrement pour avoir l’avis de Nadine Morano : « Que pensez-vous de … » ; « Mais qu’en pensez-vous Nadine Morano ?!»). Il n’hésite pas à la relancer sur les questions auxquelles il veut à tout prix avoir une réponse, notamment sur la hausse de la TVA.
Nadine Morano est présente pour convaincre. Elle doit mettre en avant ses connaissances de l’actualité politique pour convaincre les auditeurs/téléspectateurs mais aussi pour convaincre Jean-Jacques Bourdin.
Cependant à plusieurs reprises elle semble échouer. Bourdin en profite pour la déstabiliser, et la relancer à nouveau sur les questions qui intéressent les auditeurs. Il est très important de noter que Bourdin relance systématiquement Nadine Morano sur les questions centrales qui peuvent préocupper les auditeurs, notamment celles de la hausse de la TVA.
 Orientations discursives :
Jean-Jacques Bourdin tient un discours hétéro centré explicatif. Son interview se fonde sur une actualité politique (et non sur sa personne) qu’il veut décrypter avec son invité pour en informer les auditeurs/ téléspectateurs.
Nadine Morano tient un discours à la fois hétéro centré explicatif dans l’extrait que nous avons analysé, puis autocentré en seconde partie.
Types de tour de parole/ temps de parole :
Jean-Jacques Bourdin prends la parole en premier comme le suggère son rôle d’interviewer. Il pose les questions à Nadine Morano, il adopte donc une position d’intervention directive. Nadine Morano quant à elle, répond aux questions de Jean-Jacques Bourdin, sans jamais asserter. Elle adopte donc une position d’intervention réactive sans jamais changer de sujet.
Le temps de parole est, en toute logique, largement en faveur de l’invité :
BOURDIN 2012
Jean-Jacques Bourdin
Nadine Morano
Total
Temps de parole
2,26
4,34
6,20 minutes
Nombre d’intervention
60
40


On observe néanmoins que le journaliste intervient plus souvent que son invité. Cela se concrétise par de nombreuses réflexions de Jean-Jacques Bourdin sur les réponses de Nadine Morano. Il la coupe régulièrement. Voici un exemple :
5’22 :
-          Nadine Morano :
« Prenons un salaire et une tranche de centeuro sur le salaire, (elle fait une liaison qui n’existe pas)
 les charges sont… »
-           Jean-Jacques Bourdin la coupe :
«  Cent euros, ceneuros…
-          Nadine Morano :
« Oui, pardon, cent euro sur le salaire, oui, pardon, pardon pour cette liaison… »
-          Jean-Jacques Bourdin
« Non non ce n’est pas grave ça arrive »

Le journaliste n’hésite pas à reprendre Nadine Morano sur ce problème de liaison. Il prend alors une position particulière sur l’invité.
Types de relations :
Horizontale :
Sans être intime ou convivial, leur relation semble tout de même familière. Ceci est particulièrement dû au tempérament de Jean-Jacques Bourdin qui n’hésite pas à « titiller » son invité pour obtenir les réponses qu’il attend à ses questions.
Verticale :
Jean-Jacques Bourdin se met sur un pied d’égalité avec son invité.  Même si Nadine Morano a un temps de parole largement supérieur au journaliste, de nombreuses séquences montrent même une sorte de basculement des rôles :
6’04- 6’30 :
-          Jean-Jacques Bourdin :
«  A combien est la TVA en Allemagne ? »
-          Nadine Morano :
« Mais la TVA en Allemagne est plus élevée que la nôtre »
-          Jean-Jacques Bourdin :
Elle est à combien ?
-          Nadine Morano :
Elle a trois points supérieurs à la notre
-          Jean-Jacques Bourdin :
« Mais vous dites des bêtises, elle est de 19 points en Allemagne »
-          Nadine Morano :
« Oui elle est de 19 points »
-          Jean-Jacques Bourdin :
« La nôtre est de 19,6 »
-          Nadine Morano :
« Oui, oui »
-          Jean-Jacques Bourdin :
« Mais vous dites des bêtises Nadine Morano, vous ne maitrisez pas le sujet »
Le contrat de communication
Cet extrait montre que Jean-Jacques Bourdin adopte une position plus haute que son invité. En effet, dire « vous ne maîtriser pas le sujet » sous-entends que lui le connaît mieux qu’elle, qui est censée être l’expert en ce domaine. Ceci nous amène à nous demander si le contrat de communication dans l’émission « Bourdin 2012 » n’est pas rompu ?
Pour répondre à cette question nous nous appuierons sur la notion de situation de communication, définie par Patrick Charaudeau. Une situation de communication implique un échange entre au moins deux personnes.  Il y a donc interaction. Selon Patrick Charaudeau, un contrat de communication se définit comme un contrat où « les partenaires d’un acte de communication dans un cadre contractuel qui est le contexte de l’énonciation, doivent respecter des conditions du contrat s’ils veulent aboutir à une intercompréhension ».
Jean-Jacques Bourdin ne respecte pas la place d’expert de Nadine Morano, et la remet en question. De ce point de vue le contrat semble rompu.
Connaissant le contexte dans lequel se déroule l’émission, il semble alors pertinent de revenir sur les rôles endossés par les deux protagonistes et sur leur acceptation de la norme.
Revenons sur ce contexte.
A la fois diffusé sur RMC et sur BFM TV, nous sommes entrés dans la campagne présidentielle. Les invités de Jean-Jacques Bourdin sont donc dans une position de défense et de justification des idées et valeurs des partis qu’ils représentent.
Le ton n’est pas vraiment protocolaire : Jean-Jacques Bourdin s’adresse à Nadine Morano comme s’il savait plus de chose qu’elle, n’hésitant pas à le lui faire savoir. Peut-on alors affirmer que le contrat de communication est rompu ? Il l’est, si l’on considère que Jean-Jacques Bourdin n’est pas dans le logique d’intercompréhension, mais réponds de manière oppositionnelle afin de tester Mme Morano.
  2.    Jean-Paul présente ses vœux à Jean-Jacques Bourdin
Extrait du podcast RMC du 3 janvier, créneau 9h/10h de 33,16min à 34,57min
A.    Grille d’analyse

Jean-Jacques Bourdin Jean-Paul auditeur
Domaine de pratique social 
Magazine d’actualité, émission d’actualité politique sous forme d’interview
Principes Réalité, Vérité, sérieux
Finalités Faire de l’audience, faire savoir, connaître la vérité Passer à la radio ?/ dire ce qu’il pense de l’émission
Visées discursives Ecouter et répondre à son auditeur, expliquer sa façon de travailler Donner son avis sur Sea France
Orientation discursives Hétéro centré hétérocentré
Rôle Journaliste, interviewer Auditeur, fidèle de RMC
Nombre de tour de parole Moyens, courts Nombreux, longs
Temps de parole Long (1,13) Moyen (0,27)
Type de prise de parole prenant sollicité
Type d’intervention directive réactive
Actes interlocutifs Pose des questions donne son avis
Relation  Verticale
Distanciée
Relation Horizontale Relativement proche malgré le vovoiement


B.   




  






















Analyse commentée
Cet extrait concerne la prise de parole d’un auditeur, Jean-Paul, à l’antenne de RMC, pour s’exprimer sur un sujet particulier. L’intérêt porte ici sur ce qu’il se passe avant qu’il ne commence à dire son point de vue :

Rôles :

Jean-Paul, auditeur, appel dans le but de donner son avis sur la situation de «  sea France ». Mais il débute en expliquant pourquoi il aime et est fidèle à cette émission. En effet, il commence par dire à Jean-Jacques Bourdin « on se retrouve après 7 années ». Il instaure là une relation de « vieux copains » qui se sont perdu de vue sans jamais s’oublier. Il donne alors lui-même le rôle de représentant du peuple qu’incarne l’animateur de RMC à ses yeux : (à propos des présidentielles)
«  C’est nous qui détenons notre destin et pas l’inverse et c’est pour ça que vous me plaisez beaucoup dans vos propos, dans vos interventions parce que vous êtes dans ce sens-là. »

Jean-Jacques Bourdin dans cette situation, semble porter plusieurs rôle en même temps : il est de prime abord dans son rôle d’animateur de radio qui accueille un invité à l’antenne. Mais comme nous l’avons vu, l’auditeur lui donne la posture de représentant du peuple que l’animateur accepte quand il dit « J’aime tous ceux et toutes celles qui témoignent sur l’antenne parce que vous êtes comme vous êtes avec vos idées, avec vos partis pris et avec vos explications » et « je voudrais répondre à beaucoup d’auditeur, ha il est plus à gauche, il est plus à droite quand il interview, là on est en 2012 et je serais toujours le même avec tous qu’il soit à droite à gauche ou ailleurs et je poserais des questions dérangeantes à tous (…) nous resterons comme nous sommes ! » On peut donc inclure un autre rôle à son statut, celui d’agitateur.

Principes :

Il s’agit d’une émission d’actualité politique où les auditeurs passent à l’antenne les uns après les autres pour donner leur avis sur un sujet faisant l’actualité. Ceci implique des principes de réalité, de vérité et de sérieux. Le témoignage de l’auditeur n’a aucun sens s’il est fictif dans ce contexte. Qui plus est Bourdin est là pour écouter les propos de ses auditeurs, donnant rarement son avis.

Finalités :

Au-delà de la simple mais nécessaire finalité de faire de l’audience, Jean-Jacques Bourdin est avant tout là pour écouter et faire écouter ses auditeurs à tous les autres. Il est à cet égard très à l’écoute de ceux qui passent à l’antenne, les laissant développer leur sujet et donner leur avis sans les interrompre ni les couper. Il est au contraire très respectueux de l’avis de ses invités téléphoniques (le but étant de donner envie à d’autres auditeurs d’appeler pour faire partager leur point de vue).
Jean-Paul, l’auditeur en ligne, appel donc avec la finalité première de pouvoir s’exprimer sur un sujet précis à savoir « Sea France ». Néanmoins, cet appel prend une autre tournure lorsqu’il commence à s’exprimer en remerciant de prime abord Jean-Jacques Bourdin et son équipe pour le travail qu’ils font. On peut alors émettre l’hypothèse que Jean-Paul appel aussi dans le but de montrer qu’il est fidèle à cette émission et qu’il compte le rester.

Visées :

On voit donc les visées de Jean-Jacques Bourdin sont de faire parler d’écouter son auditeur, tandis que ce dernier a pour but de s’exprimer à l’antenne et de donner son avis.

Orientation discursives :


·         Le niveau discursif
Auditeur : hétéro centré, il remercie Jean-Jacques Bourdin et cite certaines de ses qualités qui sont, selon son point de vue, indispensables au bon métier d’animateur radio.
Jean-Jacques Bourdin : autocentré centré explicatif autocentré dans le sens où il profite de l’intervention de Jean-Jacques pour expliquer sa façon de faire « n’en déplaise à certains ! »
·         Types de tour de parole/ temps de parole 
Jean-Jacques Bourdin donne la parole à son auditeur. Il ne sait pas ce qu’il va dire et ne cherche pas à le presser dans son propos. L’extrait que nous avons choisi est particulier puisqu’il se passe avant que l’auditeur, Jean-Paul, ne donne son avis sur le sujet pour lequel il appel. Nous vu qu’il remercie Jean-Jacques Bourdin d’ « être ce qu’il est ». L’animateur en profite alors pour s’exprimer à son tour en « justifiant ? » sa façon de travailler notamment face aux invités politiques. Ceci est représenté par le temps de parole largement en faveur de Jean-Jacques Bourdin pour cette courte séquence. On peut imaginer qu’il n’a pas souvent l’occasion de dire son point de vue :
BOURDIN 2012 Jean-Jacques Bourdin auditeur Total
Temps de parole 1min13 27 secondes 1 min 40
Nombre d’intervention 9 5 14

·         Types de relations
Horizontale : Le ton est amical. De vieux amis de longues dates comme mis en avant plus haut.
Verticale : position égalitaire. Le rôle d’expert politique de jean-jacques bourdin n’apparaît à aucun moment dans cet extrait, une sorte de respect mutuel s’installe.

IV.   Comment en tirer parti pour une exposition politique optimale ?
1.    La double présence radio/TV
Bourdin 2012 est à la fois diffusée sur deux médias différents: la radio et la TV.
Ces deux médias reposent sur des régimes sémiotiques différents (son + image à la TV et son à la radio). Cette double sémioticité implique donc de réadapter les codes verbaux et gestuels. C’est un élément qu’il faut prendre en compte si l’on veut analyser Bourdin 2012 dans son intégralité, et non seulement dans sa matérialité radio.
Notre candidat aux élections devra donc prendre note qu’il sera filmé lors de son apparition. Il lui faudra adopter les codes vestimentaires qui sont ceux du débat politique, et la gestuelle adéquate également. Il s’agit là d’un premier entrainement à un débat, Jean-Jacques Bourdin ayant, comme nous l’avons vu, une attitude oppositionnelle quel que soit le candidat politique qui se présente.
2.    Bourdin et ses auditeurs
Jean-Jacques Bourdin instaure une relation verticale quasiment nulle avec ses auditeurs. La présence du vouvoiement marque quand même la formalité exigée par la radio, mais on le sent globalement proche de ses auditeurs, comme l’analyse de l’extrait avec Jean-Paul en témoigne.
Ses auditeurs tendent à revêtir le rôle d’expert, justifiant le fait que Bourdin n’en ait pas sur le plateau. Il s’agit, dans la plupart des cas, d’auditeurs bénéficiant d’un statut leur permettant d’apporter des réponses claires aux problématiques posées. A titre d’exemple dans l’émission du 3 janvier entre 9h et 10h, les auditeurs étaient ou cadres ou chefs d’entreprise.
Cette ambivalence auditeur/expert est à prendre en compte si l’on veut analyser l’émission : Bourdin leur laisse en effet un temps de parole plus important, et ne les coupe que très peu de fois.
L’erreur à faire pour notre candidat serait donc de faire des écarts type démagogiques, en prenant le pas d’une politique conciliatrice et en niant l’évidence de certains problèmes. Les chiffres médiamétrie ont révélé que l’auditeur moyen de RMC (comme nous l’avons vu  plus haut) est un homme, artisan, commerçant ou de profession intermédiaire, âge de 45ans ou plus.

Ce fait est à prendre en compte, l’auditorat a de l’expérience, et les intervenants auditeurs sont très compétents dans leur domaine. Notre candidat devrait donc axer son discours sur des faits avérés et surtout rester dans son domaine de compétence sans se hasarder sur des positions qui pourraient être démontées facilement soit par l’auditeur, soit par Bourdin.
 Il serait également judicieux, pour notre candidat, de ne pas faire l’erreur de tacler l’opposition politique, mais de défendre les valeurs de son parti. Notre candidat est ici pour défendre son point de vue au moyens d’arguments construits et cohérents, et non pour réfuter celui de l’opposition.
3.    Bourdin face à l’invité politique
Face à l’invité politique du jour, l’animateur n’a pas la même position qu’avec ses auditeurs. Le ton est différent.  Il se pose en effet face à son invité, à en tant que représentant de l’opposition politique (peu importe la couleur comme son discours avec Jean-Paul l’a démontré), et en tant que représentant du peuple. Dans ce rôle il pose des questions qui sont le reflet des interrogations des français. Notre candidat politique se trouvera donc face à un homme ayant à cœur de défendre les intérêts de ses auditeurs, qui n’hésitera pas à poser des questions qui fâchent. Il l’a dit, comme nous l’avons vu lors de l’intervention de Jean-Paul, il continuera à malmener ses invités politiques peu importe leur parti concernant les questions qui tiennent à cœur les français.
Aussi Jean-Jacques Bourdin n’hésitera-t-il pas à se jouer des codes de la communication en prenant une position égalitaire, non distanciée voir supérieure avec son invité. Durant toute la durée de l’interview, il ne change pas de sujet, même si l’invité politique tente de détourner ses réponses. Jean-Jacques Bourdin campe sur ses positions jusqu’à ce que la réponse de l’invité lui convienne. A cet égard l’analyse de l’interview de Nadine Morano du 5 janvier 2012, permettra d’étayer ces propos. En effet, il n’hésite pas à la remettre à sa « place » lorsqu’elle se trompe sur le taux de TVA en Allemagne. («  Mais vous dites des bêtises Nadine Morano, vous ne connaissez pas le sujet »). Notre candidat devra donc faire attention à deux points précis : l’obstination de Jean-Jacques Bourdin ainsi que ses connaissances aiguisées sur les sujets qui préoccupent les français.
Pour l’obstination la meilleure attitude consiste à ne pas toujours chercher à avoir raison, à inclure une part de réflexivité et à tenter, pourquoi pas, de déstabiliser Jean-Jacques Bourdin. Pour les fautes de syntaxes et de prononciation, notre invité doit prendre de la hauteur et ne pas prendre la mouche. La remarque adressée à Nadine Morano sur les « cents euros » aurait pu être déjouée par un peu d’autodérision, par exemple « Monsieur Bourdin, pensez-vous que les français accordent plus d’importance à une faute de prononciation plutôt qu’à un point central et problématique que je suis en train d’exposer ? ».
Quant aux connaissances aiguisées de M.Bourdin, nous conseillons à notre candidat de reconnaître la légitimité de l’animateur. Sur la question de la TVA, une attitude noble aurait été de saluer les connaissances de M.Bourdin. Ce type d’attitude aura probablement pour effet de réduire la virulence oppositionnelle de M.Bourdin, et a défaut d’avoir cet effet aura un impact sur l’auditeur, qui comprendra qu’il est en présence d’un invité politique qui ne cherche pas toujours à avoir le dernier mot.
Notre candidat devra également prendre conscience de l’importance de la double diffusion radio/TV. Le plateau de Jean-Jacques Bourdin, télévisé (Cf Photos), s’apparente plus à un plateau de débat politique qu’à un plateau de radio. La position, de face, nous donne l’impression que Bourdin incarne plus le rôle de membre de l’opposition politique que d’animateur radio. L’occasion pour notre candidat de considérer son passage chez Bourdin comme un premier débat, où l’opposant ne serait pas un représentant politique mais un homme chargé d’incarner l’opinion protestataire du peuple.
Pour conclure ce dossier nous pensons que question centrale que devra traiter notre candidat est la suivante : comment disputer à M.Bourdin son statut de représentant du peuple ? Sans parler de recherche perpétuelle d’hégémonie, l’erreur à ne pas faire est d’adopter une posture oppositionnelle face à l’animateur. En tant que représentant des français, il faut que notre candidat réussisse à aller dans le sens de M.Bourdin, tout en légitimant son programme politique. Le discours doit être construit de telle sorte que l’auditeur comprenne que M.Bourdin n’est pas son seul représentant, il y a aussi un invité politique présent sur le  plateau qui prend ses intérêts à cœur.

Webographie sélective :