Emission « Expliquez-vous » du 14 mars 2012, présentée par Arlette Chabot sur Europe 1 avec Mariel le Pen
Afin de développer une grille d’analyse précise nous avons
choisi de nous focaliser sur une séquence de 4 min (de 35:30 à la fin).
Notre but est dans un premier temps d’évaluer le rôle des intervenants : Arlette Chabot, Michael Darmon et Marine Le Pen, en nous appuyant sur une grille d’analyse théorique.
Notre but est dans un premier temps d’évaluer le rôle des intervenants : Arlette Chabot, Michael Darmon et Marine Le Pen, en nous appuyant sur une grille d’analyse théorique.
Nous avons dans un deuxième temps étudié le style et la place
de chacun d’eux en développant une partie plus critique.
1)
Grille d’analyse
|
|||
CHABOT
|
DARMON
|
LE
PEN
|
|
Rôles
|
Journaliste
|
Journaliste
|
Candidate/Interviewée
|
Visées
discursives
|
poser des
questions
|
provoquer,
poser des questions
|
expliquer
et présenter son programme
|
Finalités
|
audience
|
faire
de la polémique
|
séduire
les électeurs
|
Orientations
discursives :
|
hétérocentré
|
hétérocentré
|
égocentré
|
égocentré ou
hétérocentré
|
|||
Orientations
discursives :
|
narratif
|
narratif
|
explicatif
|
narratif ou explicatif
|
|||
Principes
|
réalité,
sérieux
|
réalité,
sérieux
|
vérité,
sérieux, réalité
|
Relations horizontales
|
éloignée
|
éloignée
|
éloignée
|
Relations
verticales
|
(B) AC / MLP (H)
AC = MD
|
(B) MD/ MLP (H)
MD = AC
|
(B) AC / MLP (H)
(B) MD / MLP (H)
|
Coopératif ou
conflictuel
|
coopératif
|
coopératif
|
conflictuel
|
Temps de
parole
|
49s
|
23
s
|
3min29s
|
Nombre de
prises de parole
|
6
|
13
|
13
|
Types de
prises de parole : prenant sollicité, autorisé
|
Prenant
(100%)
|
Prenant
(50%), sollicité (50%),
|
Prenant (50%), sollicité (50%),
|
dimensions
dominantes du discours :
|
logos
|
logos
|
ethos,
logos
|
ethos, logos, pathos?
|
|||
Actes
informatifs autonomes :
|
3
|
1
|
0
|
assertions
|
|||
Actes
sollicitants :
|
Questions 3
Réponses 3
|
Questions
1
Réponses
0
|
Questions 2
Réponses 5
|
questions/réponses
|
|||
Actes
sollicitants :
|
demande de
validation : 1
|
Demande de
validation :1
|
demande
de validation : 2
|
demande de
validation/validation + accord/désaccord
|
|||
Actes
traitant d'info. déjà émises :
|
Validation,
accord : 1
Invalidation :
1
|
Validation :
1
|
Validation
accord :1
Validation
désaccord : 1
Invalidation :
4
|
vallidation,
réception, iteration, accord, désaccord
|
|||
Interventions
problématisées directrices
|
0
|
1
|
0
|
Interventions
problématisées de relance par reprise
|
0
|
0
|
2
|
Interventions
problématisées de relance par adjonction
|
1
|
0
|
0
|
Interventions
problématisées de relance par changement de focalisation
|
1
|
0
|
0
|
Interventions
réactives
|
2
|
1
|
5
|
Interventions
continuatives
|
1
|
0
|
1
|
Interventions
saltatoires
|
0
|
0
|
0
|
Interventions
non problématisées
|
3
|
2
|
0
|
actes de
parole dominants de la sphère de l'information
|
0
|
1
|
1
|
actes de
parole dominants de la sphère de l'évaluation
|
0
|
0
|
4
|
actes de
parole dominants de la sphère de l'interaction
|
1
|
1
|
0
|
actes de
parole dominants de la sphère contractuelle
|
3
|
2
|
0
|
actes de
parole dominants de la sphère actionnelle
|
0
|
0
|
0
|
H = relation
verticale haute
B = relation
verticale basse
Synthèses des grands points à
retenir :
Marine le Pen
occupe l’ensemble du temps de parole soit plus de 3 minutes, l’équivalent de 13
tours de paroles. Elle impose ainsi son discours presque sans être interrompue.
Elle est donc en position dominante, dirigeant l’interview et prenant
ouvertement la parole sans être toujours sollicitée.
Il y a peu de
co-construction de sens entre les différents intervenants puisque Marine Le Pen
monopolise le temps de parole, il s’agit ici davantage d’un monologue de la
candidate que d’une interview dirigée par des journalistes. Arlette Chabot ne
fait pas d’interventions directrices qui pourraient recentrer le discours de
Marine le Pen. Au contraire elle rebondit, ajoute ou refocalise les propos de
la candidate.
Cette dernière
se cantonne à la sphère de l’évaluation car elle est en constante prise de
position, notamment dans ces interactions réactives répétées. Comme nous
pouvons le voir dans son intervention « Alors 0 déficit cela revient à dire 120 milliards d’économie en 2015,
ils vont faire 120 milliards d’économie en 2015 ?! », Marine Le
Pen discrédite les propos d’Arlette Chabot et par la même occasion dévalue les
propositions de ces candidats adverses. La candidate du front national invalide
les propos des journalistes à plusieurs reprises ce qui amplifie sa volonté d’affirmer
ses positions et de convaincre son auditorat.
En gardant une
position ferme, Marine Le Pen déstabilise même les journalistes qui perdent en
légitimité aux yeux des auditeurs.
Exemple :
- Marine Le Pen « Non, ce n’est pas possible de résorber la
dette (...) Non, mais ils disent 0 déficit »
- Arlette Chabot « Ah oui pardon, ils disent 0 déficit, excusez-moi... »
Comme nous
l’avons dit précédemment, Marine Le Pen mène le débat, on assiste donc à une
inversion des rôles : Marine Le Pen à travers des interventions
problématisées par relance questionne Arlette Chabot afin d’appuyer ces dires
et ainsi renforcer la portée de son discours. Ici, Les réponses d’Arlette
Chabot font partie intégrante de la construction de l’argumentation de Marine
Le Pen.
Exemple :
- Marine Le Pen « Je m’attaque à ce qui fait vraiment souffrir
la France (...) Qu’est ce qu’il pense Mr Hollande, du fédéralisme
européen ? Oui, non, plus, moins ? »
- Arlette
Chabot « Bah, il veut renégocier le
traité déjà signé... »
- Marine Le
Pen « Mais dans quel
sens ? »
- Arlette
Chabot « Plus de croissance »
La construction discursive entre les différents intervenants
se fait donc parallèlement car il y a peu d’interactions et les seules
interventions engagées par les journalistes pour orienter le discours de Marine
Le Pen sont un échec.
Il est par ailleurs possible de qualifier l’interview d’ «
informative » car Marine Le Pen réussit tout de même à exposer quelques aspects
de son programme comme sa conception de la politique européenne et économique à
mener pour la France.
La nature de la relation verticale de la journaliste avec
Marine Le Pen confirme nos observations : Arlette Chabot est dominée par la
candidate dans les échanges.
Aussi elle est dans la coopération et non dans la
confrontation. La proportion de son temps de parole par rapport à Marine Le Pen
est révélatrice de sens : Arlette Chabot parle quatre fois moins que la
candidate (49 sec contre 3min 29 sur une séquence de 4 min). A noter qu’elle
prend deux fois moins la parole que la candidate du front national.
Par ailleurs, le manque d’initiatives de la journaliste
s’illustre par ses rares interventions problématisées (pendant notre
séquence) : elle ne fait aucune intervention directrice, seulement deux
interventions de relance et trois interventions de nature réactive ou continuative.
Par ailleurs, elle fait presque autant d’interventions non
problématisées (trois) ce qui lui permet simplement de gérer et clôturer
l’échange. Arlette Chabot a donc un discours uniforme, ses interventions sont
fonction du discours de la candidate qui est en demande de validation constante.
Ainsi, Arlette Chabot est là pour valider ou non les propos de Marine Le Pen.
De plus, la journaliste ne prend à aucun moment position, ne
donne pas son avis et ne critique pas car elle ne formule aucun acte de parole
de la sphère de l’évaluation. Les actes de parole dominants de la journaliste
sont ceux de la sphère contractuelle, ce qui est en affinité avec son identité
professionnelle.
Fait exceptionnel à noter dans la séquence étudiée, Arlette
Chabot vient même à s’excuser suite à l’une de ces interventions, ce qui prouve
son manque d’engagement en tant que journaliste.
Exemple :
- Arlette
Chabot « Ah oui pardon, ils disent 0
déficit, excusez-moi... »
Arlette
Chabot, analyse l’aspect médiatique en parlant de Marine Le Pen comme d'un
"personnage", elle pose des questions sur les regroupements
politiques prévus si cette dernière venait à gagner. C'est assez pragmatique.
De son côté,
Mickael Darmon est plutôt dans le rappel de faits passés, à la recherche du
sensationnel et il tente d'en faire dire plus à la candidate. Cela se rapporte
à son statut de journaliste d'actualité.
Tout comme sa collègue, le journaliste est largement dominé
dans l’échange par la candidate du Front National. Son temps de parole est le
plus faible des trois intervenants : il s’exprime deux fois moins qu’Arlette
Chabot et neuf fois moins que Marine Le Pen (23 secondes contre 3min29 sec).
Sur toute la séquence il ne pose qu’une seule question, à la
toute fin de l’interview. Celle-ci est sa seule et unique intervention
directrice, ouvrant ainsi un nouveau domaine thématique : celui de la polémique
et de la viande Hallal.
À par cela, le journaliste apporte peu d’initiative
thématique, se contentant de faire une intervention réactive et deux
interventions non problématisées.
2)
Les tours de parole :
Extrait qui débute à 35 min 30 jusqu’à la fin de
l’interview: débute avec Marine Le Pen « Je m’attaque à ce qui fait vraiment souffrir la France (...) Qu’est ce
qu’il pense M. Hollande, du fédéralisme européen ? Oui, non, plus, moins ? ».
Nous entamerons l’analyse partir de l’intervention d’Arlette Chabot.
Tour
de parole
|
Type
d’intervention
|
T1 :
AC « Bah, il veut renégocier le traité déjà signé... »
|
Intervention
réactive / Réponse
|
T2 :
MLP « Mais dans quel sens ? »
|
Intervention
problématisée de relance par reprise
|
T2 :
AC « Plus de croissance »
|
Intervention
réactive
|
T3 :
MLP « Plus de croissance ? »
|
Intervention
problématisée de relance par reprise
|
T3 :AC
« Oui »
|
Validation
accord
|
T4 :
MLP « Bonjour je voudrais faire rentrer plus de croissance ! En
deux ans»
|
Intervention
réactive
|
T4 :
AC « Des mesures pour plus de croissance... »
|
Assertion
|
T5 :
MLP « Hein, oui c’est comme ça que ça marche ... Qu’est ce qu’il
pense de l’immigration ? (...) Ce sont ces grandes questions auxquelles
il faut répondre et auxquelles ils cherchent à échapper ! »
|
Intervention
réactive
|
T5 :AC
« Tout le monde a un objectif : la résolution de la dette. Zéro
dette en 2016 ou 2017 »
|
Interventions problématisées de relance par
changement de focalisation
|
T1 :
MD « Oui en 2016 »
|
Assertion
/ Complémenter
|
T6 :
MLP « 0 dette en 2016, oui mais ça c’est pas possible »
|
Validation
désaccord
|
T6 :
AC « Ce n’est pas tenable à votre avis ? »
|
Intervention
problématisée par adjonction / Demande de validation
|
T7 :MLP
« Non ce n’est pas possible »
|
Invalidation
/ Acte de parole dominant la sphère de l’évaluation
|
T7 :
AC « mmhh »
|
Interjection
|
T8 :
MLP « Non, ce n’est pas possible de résorber la dette (...) Non, mais
ils disent 0 déficit »
|
Invalidation
Actes
de parole dominant la sphère de l’information
|
T8 :
AC « Ah oui pardon, ils disent 0 déficit, excusez-moi... »
|
Assertion
/ Reconnaître / Intervention non problématisée
|
T9 :
MLP « Alors 0 déficit cela revient à dire 120 milliards d’économie en
2015, ils vont faire 120 milliards d’économie en 2015 ? (.. ) la
solution est de monétiser la dette, en créant de la monnaie et en remboursant
en partie les intérêts et en partie la dette»
|
Intervention
réactive
|
T2 :
MD « Alors on vous écoute au cours de cette émission et on a le
sentiment que vous êtes revenue... »
|
Intervention
problématisée directrice
|
T9 :
AC « Il reste une petite minute »
|
Acte de parole dominant de la sphère
contractuelle
|
T3 :
MD « sur le terrain économique, maintenant que vous êtes candidate que
vous avez des signatures, les polémiques c’est terminé, on ne fait plus de
polémique comme par exemple vous l’avez fait que la viande hallal... ?
|
Intervention
problématisée directrice
Acte
de parole dominant la sphère de l’interaction
|
T10 :
MLP « Mais non, vous me posez des questions économiques, si je vous
réponds Hallal vous allez me prendre pour une folle »
|
Invalidation
/ Acte de parole dominant la sphère de l’évaluation
|
T4 :MD
« Non mais pour autant... »
|
Intervention
réactive
|
T11 :
MLP « Vous me posez des questions d’économie je vous réponds économie... »
|
Intervention
continuative
|
T10 :
AC « C’est bizarre quand même.. »
|
Invalidation
|
T12 :
MLP « Non mais le Hallal n’est pas une polémique Mr Darmon, c’est un
sujet essentiel (...) Moi j’écoute une personne le peuple français. Le
plus important c’est la confiance que doit avoir le peuple en ses dirigeants
et la confiance que les dirigeants doivent mériter du peuple»
|
Intervention
réactive / Invalidation / Acte de parole dominant la sphère de l’évaluation
|
T11 :
AC « Heu, vous restez... je reprends autrement la question posée par
Mikael, on dit que Marine le Pen va revenir à ses fondamentaux l’immigration,
moins de social (...) vous garder les mêmes thèmes de campagnes ?»
|
Intervention
continuative
|
T13 :
MLP « Je garde les mêmes thèmes de campagne, c’est ce que en quoi je
crois au plus profond de moi même (...) Moi j’écoute une personne, le peuple
français. C’est lui que j écoute. C’est pour lui que je me bats, ce sont
ces intérêts que défends et les intérêts de personne d’autre»
|
Validation
accord / Intervention réactive / / Acte de parole dominant la sphère de
l’évaluation
|
T12 :
AC « Merci Marine Le Pen »
|
Intervention
non problématisée / Acte de parole
dominant de la sphère contractuelle
|
T5 :
MD « Merci »
|
Intervention
non problématisée / Acte de parole
dominant de la sphère contractuelle
|
T13 :
AC « Merci Mikael »
|
Intervention
non problématisée / Acte de parole
dominant de la sphère contractuelle
|
T6 :
MD « A bientôt »
|
Intervention
non problématisée/ Acte de parole
dominant de la sphère contractuelle
|
Plus
l’échéance des élections approche, plus un candidat se doit de paraître «
acteur » de la campagne, d’être présent (directement ou non) dans les médias,
ceci pour accroitre sa « visibilité » médiatique, parfaire sa crédibilité, afin
d’attirer, de convaincre le plus d’électeurs possible, surtout les indécis ou
des abstentionnistes. Cette séquence avec Marine Le Pen dans l’émission «
Expliquez-vous » d’Arlette Chabot reflète bien ce phénomène.
La répartition
du temps de parole imposé par le CSA joue un rôle en fonction du candidat
interviewé et influe sur l’attitude qu’il va adopter. Ici Marine Le Pen vacille
entre le rôle de « victime » face au système (notamment pour obtenir ses 500
signatures), et de « sauveuse » des français. Les journalistes politiques mènent
assez souvent les débats sous la forme d’ un interrogatoire de « prévenu
candidat », surtout quand celui-ci n’est pas issu du « système recommandé » comme
Marine Le Pen.
Cependant dans
l’extrait que nous avons choisi ici, les rôles sont inversés, Marine Le Pen
assaille Arlette Chabot de questions, et mène l’interview en occupant la quasi
globalité du temps de parole. Elle s’attaque même aux deux candidats favoris,
François Hollande et Nicolas Sarkozy : « Où
veulent-ils mener la France? Quelle est leur vision de l’homme ? ».
Seul à la fin
de l’interview, Mickael Darmon cherche à déstabiliser Marine Le Pen en abordant
les sujets polémiques affiliés au front national, comme l’immigration et le
sujet de la viande Hallal en France.
La stratégie
de communication de Marine Le Pen réside dans la dédiabolisation du front
national. La candidate frontiste a donc proposé d'"arrêter les plans de
renflouement" aux banques et souhaite "ramener les banques à leur
juste mesure" afin que "les peuples reprennent le pouvoir", tentant
de délégitimer ses adversaires, notamment François Hollande et Nicolas Sarkozy.
3
Trois intervenants : Arlette Chabot, Michael Darmon,
Marine Le Pen :
Arlette Chabot :
Arlette Chabot :
Dans cet extrait, la journaliste n’est pas dans la recherche de controverse. Sa position est même étrangement neutre et elle reste en
retrait. Il est possible de se demander si sa méthode d’interview entre en
cohérence avec les exigences éditoriales d’Europe 1, Arlette Chabot en étant la
directrice de l’information depuis mars 2011 (et jusqu'en mai 2012).
Il est par ailleurs important de noter qu’Arlette Chabot est monostyle, peut importe le média sur lequel elle intervient (France 2 jusqu‘en
2011, Europe 1...) cela conforterait donc l’hypothèse selon laquelle elle ne se
plie pas à des exigences hiérarchiques mais suit son propre style.
L’émission s’intitule « Expliquez-vous », ce qui
laisse entendre que la journaliste attend son invité de pied ferme et qu’elle a
des questions précises à lui poser.
De plus, sur la photo qui accompagne la présentation de son
émission sur le site d’Europe 1, Arlette Chabot apparait comme étant prête à en
découdre et à mener le débat. Le regard dur, a peine souriante.
Pourtant dans cet extrait, la candidate Marine Le Pen fait
l’objet d’un traitement incroyablement clément. Pourquoi ? Ce constat pourrait
être corrélé avec le profil d’audience d’Europe 1 : des hommes cadres, petits
patrons plutôt de droite.
Ainsi la journaliste n’est pas dans un exercice de recherche
de révélations, au contraire nous remarquons à la fin de l’émission un
inversement des rôles, Arlette Chabot se trouvant même à certains moments prise
à partie par Marine Le Pen.
Cela est à nuancer pour le début de l’émission qui reste un
exercice d’interview « question-réponse » plutôt classique. Par
ailleurs, même quand la journaliste se permet d’interrompre la candidate elle
s’excuse, demeurant toujours très courtoise (elle prononce la phrase
« pardonnez-moi » deux fois).
Ses intérêts :
A priori son principal intérêt est de faire de l’audience.
Comme nous l’avons précisé précédemment, elle n’est pas dans la recherche du
sensationnalisme ou du « buzz ». Nous supposons ainsi que le fait
même d’inviter une candidate comme Marine Le Pen en période de campagne
électorale sur la tranche horaire 19h-20h attire des auditeurs.
Michael Darmon :
Depuis 2011, il est éditorialiste politique et intervieweur
pour la chaîne d'information en continu i>Télé .
Il est intéressant de noter qu’il a suivi l'actualité du Front
national de 1995 à 2004 et qu’il a écrit de nombreux essais sous
formes d'enquêtes portant sur le Front
national.
Son style est complètement différent de celui d’Arlette
Chabot, car son ton est plus direct et incisif. Au début de l’interview il se
montre très présent. Sa première phrase à Marine Le Pen est la suivante :
« Alors ça y est vous êtes une vraie
candidate, enfin ? ».
Il se met ensuite en retrait pendant tout le reste de
l’interview, se contentant d’interpeller la candidate de temps à autre :
« mais vous alors ? »,
« Nicolas Sarkozy vous fait les
poches ? » (à propos de la politique européenne).
Ainsi tout au long de l’interview Michael Darmon apparait
plus comme un soutien d’Arlette Chabot que comme un journaliste à part entière.
Dans l’extrait que nous avons choisi, donc à la toute fin de l’émission, il
revient « à la charge » en parlant polémique et viande Hallal.
Ses intérêts :
Apparaissant comme un simple intervenant et n’étant pas
présent à chaque fois, Michael Darmon est plus dans la recherche de
« vérité » et d’informations justes plus que de l’audience.
Marine Le Pen :
La candidate du Front national est la dernière à passer dans
l’émission « Expliquez-vous », ce qui explique sûrement le fait
qu’elle se met dès le début dans la confrontation avec l’UMP et le Parti
Socialiste.
Nous observons chez la candidate un style d’expression bien
plus familier sûrement dans le but de paraître « proche du
peuple ».
Ainsi, tout au long de l’interview elle prononce des
formulations telles : « galérer »,
« association de la carpe et du lapin à l’UMP » « le référendum
n’est pas un gadget » « ça sert à rien de vider la mer avec une
petite cuillère » « on est morts, on est morts ! » (à propos
de l’euro face à 1 dollar 30). « la
Grèce ne se redresse pas, elle s’enfonce ». « faut arrêter de prendre
les gens pour des benêts », « mais je m’en moque ce ne sont pas mes
amis à moi ! », « mais si je vous parle d’autre chose vous allez me
prendre pour une folle ! », « la gauche a explosé en vol ».
La candidate est également dans la théâtralisation et la
dramatisation « oh mais
seigneur… la proportionnelle !» « terrorisme intellectuel »,
« dictature européenne », « il faut arrêter de raconter des
mensonges aux français », « ils ont menti comme pour le sang
contaminé…c’est gravissime ».
Dans notre extrait qui rassemble les 4 dernières minutes de
l‘interview, Marine Le Pen est dans un exercice de quasi monologue, en arrivant
même à inverser les rôles d’interviewer et d’interviewé : « qu’est-ce qu’il pense M.Hollande honnêtement du fédéralisme
européen ? Oui ? Nan ? Plus ? Moins ?… », « Bonjour je voudrais plus
de croissance ! ». « continue, stop, encore…on sait pas ». « OU
veulent-ils mener la France ? » « Pensez-vous que…? Évidemment que
non. ».
Sans être dans la recherche de spectacle et de controverse
comme son père, Marine Le Pen cherche tout de même à marquer les esprits dans
la façon dont elle s’exprime et s’adresse aux journalistes : « écoutez monsieur Darmon soyons sérieux »
« nan mais attendez, écoutez ».
A noter qu’elle met une distance entre elle et les journalistes.
Ses intérêts : Elle dit défendre les intérêts du
peuple français et de personne d’autre. Sa dernière phrase : « c’est pour lui [le peuple français] que je
me bats ».
4)
Conclusion : Mise en perspective de notre analyse au
regard des différents résultats obtenus par les autres groupes
Nous avons remarqué que Marine Le Pen s’est montrée bien plus
incisive sur Europe 1 avec Arlette Chabot qu’avec Jean Michel Apathie et
Jean-Jacques Bourdin, respectivement sur RTL et RMC.
Moins avenante et plus agressive, elle n’a pas hésité à mener
l’interview, laissant en retrait les deux journalistes comme nous l’avons
précisé dans notre analyse.
Cela entre sûrement en corrélation avec l’attitude passive de
la directrice de l’information d’Europe 1 qui a la particularité d’être
« monostyle » peut importe le média sur lequel elle intervient.
Par ailleurs que ce soit quand elle questionne Marine Le Pen,
François Hollande ou un autre candidat, Arlette Chabot reste incroyablement neutre. Cela est assez rare et étonnant, surtout en période de
campagne électorale. Ce n’est, par exemple, pas le cas de Jean-Jacques Bourdin
sur RMC qui a clairement fait preuve d’indulgence avec François Hollande alors qu’il est connu pour être
particulièrement vif lors de ses interviews d’hommes politiques.